Morestel – Un bourg fortifié

Le bourg de Morestel s’est développé au pied du rocher qui porte le château et fut certainement clos de remparts dans la première moitié du XIVe siècle.

Deux portes y donnaient accès : la porte Saint Symphorien dont la trace reste visible par un piedroit dans le mur et la porte Murine (tournée vers la Maurienne), reliées par l’unique rue commerçante du bourg, la « Grande Vie » (du latin via, la voie), aujourd’hui Rue Ravier. À l’intérieur de l’enceinte, parfois adossés au rempart du Château, de nombreuses maisons, granges et jardins se pressaient, ainsi que des résidences de la petite noblesse locale, parfois fortifiées.

La Maison des MONTAGNIEU (Rue Ravier), aujourd’hui occupée par les Sœurs Franciscaines et celle de MOIDIEU (Place Grenette), sont bâties sur les remparts du bourg. À l’extérieur, près des portes, se développaient deux faubourgs.

L’Église

Du XVe siècle, inscrite à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques (en partie). À voir : remarquable inscription gothique dans la chapelle de la Vierge.

La première église de Morestel se trouvait en dehors du bourg actuel. À la révolution, le culte est transféré dans l’église des Augustins, acquise par la commune au titre des Biens Nationaux. Construite en même temps que le couvent, l’église (aujourd’hui consacrée à l’Archange Saint Michel) est surtout remarquable par l’importance donnée au chœur et par la belle qualité de sa construction : taille de pierre impeccable, décor sobre mais soigné.

Nervure des voûtes et décor sont caractéristiques de l’art gothique de la fin du XVe siècle. La façade paraît plus tardive (XVIe siècle).

Aux campagnes de restauration du XIXe siècle, on doit : le rehaussement du clocher par une lanterne gothique terminée en terrasse, avec sa balustrade en ciment, une tourelle d’angle abritant l’escalier d’accès à la plate-forme et le percement des oculus, fenêtres et rose de la façade. Le vitrail contemporain, dû à Christophe Berthier, a été installé après restauration complète de l’édifice en 1999.

La Seigneurie de Morestel

Une famille portant le nom de Morestel est attestée dès 1081. Elle devait posséder, sur le promontoire rocheux du Mollard Paradis, un premier château, au moins depuis le XIIIe siècle.

Un temps aux mains des MIOLANS, originaires de Savoie, Morestel rejoint le domaine du Dauphin au début du XIVe siècle ; le mandement (territoire dépendant du château) est alors dirigé par un officier, le châtelain. À partir de 1421, la terre de Morestel est confiée à des seigneurs locaux, parmi lesquels il convient de signaler les ROSSILLON (du Bouchage), fondateurs du couvent des Augustins et de l’hôpital, et les BATHERNAY (de la Drôme), qui doivent leur fortune au service du Roi Louis XI.

Morestel, par sa position en limite du Dauphiné et de la Savoie, connut de près les conflits Delphino-Savoyards de la première moitié du XIVe siècle (pillage de la ville en 1342). Plus ou moins entretenus, châteaux et bourgs fortifiés servirent encore pendant les guerres de Religion ; sièges et attaques (1576/1589) mirent à mal les murailles qui furent finalement abattues.

Blason de MORESTEL : de sinople (vert) au chef d’or, chargé de trois fleurs de lys d’azur (bleu).

Blason des BATHERNAY : écartelé d’or et d’azur

Mesure à Tissus

Cette grande pierre plate, gravée de traits perpendiculaires, est identifiée comme mesure à tissus, mais il est difficile de déterminer sa datation et sa fonction précises.

Il est probable que, installée sous la Halle avec les mesures à grains, à vin et les poids, elle servait de mesure étalon, dans la lutte constante des autorités contre les « fausses mesures » avant l’apparition du système métrique.

Le Château

XIVe siècle. Donjon inscrit à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques

L’actuel donjon, fortement restauré dans les années 1960/1970, est sans doute ce que les textes nomment « la grande tour » ou « tour prison ». De plan quadrangulaire, il abrite une salle basse où l’on plaçait peut-être les prisonniers et une salle haute éclairée de fenêtres à coussièges et accessible depuis le chemin de ronde. Une toiture couvrait l’ensemble à la place de l’actuelle terrasse.

Dans l’enceinte du château, à laquelle un pont-levis et une poterne donnaient accès, prenaient place des édifices résidentiels, propres à loger, à l’occasion, des personnages prestigieux comme le Dauphin Humbert II (1334) et le futur Roi de France Louis XI (1450). Les textes nous apprennent l’existence d’une grande salle de Réception avec cheminée, d’une chapelle dédiée à Saint Pierre, d’un cellier avec des chambres au-dessus ; mais aussi celle de bâtiments utilitaires comme une cuisine, une citerne pour recueillir les eaux de pluie, un grenier où emmagasiner les blés versés comme impôts, deux étables au moins, une seconde tour (qui n’étaient pas terminée en 1417)…

La Maison à Boutique

Bordant l’ancienne Grande Rue du bourg, à proximité de la place du marché, cette maison du XVe siècle abritait au rez-de-chaussée une boutique où le commerçant pouvait présenter sa marchandise sur l’étal.

À l’étage, deux grandes baies à meneau et traverse éclairaient la salle, tandis que des chambres pouvaient ouvrir sur l’arrière. D’étroits passages, égouts plus que ruelles, séparent les maisons entre elles. Celui de droite a été obturé lorsque fut installée, sans doute au XVIe siècle, une élégante porte encadrée par deux pilastres, ouvrant sur un escalier menant à l’étage.

D’autre demeures du Moyen-Âge se laissent deviner en parcourant le bourg, par la présence d’ouvertures du même type, plus ou moins transformées.

La Fontaine de la Place Grenette

C’est à Monsieur Joseph PECOUD, propriétaire de la Maison Ravier de l’époque, que l’on doit la transformation du puits en fontaine en 1840, ainsi que l’indique l’inscription gravée dans le massif qui la surmonte : « l’an du seigneur 1840, grâce au sieur Joseph PECOUD, préfet de l’Isère, à l’aide d’une pompe, les nymphes bavardes arrosent ».

La Place Grenette

Comme celle de Grenoble, la Place Grenette doit son nom aux grains qu’on y échangeait lors du marché hebdomadaire, le mardi, ou des foires de la Saint Nicolas (6 décembre) et de la Saint Symphorien (9 mai et 22 août).

Les taxes sur les marchandises, en particulier sur le sel, rapportaient quelques revenus au Châtelain. Sur cette place se trouvait peut-être le grenier de la châtellenie et la « banche de la cour », où le juge tenait ses assises.

Une halle de trois travées s’y dressa un temps. Une grande charpente de bois à deux pans couverte de lauzes la couvrait. Elle fut abattue en 1871, sa vétusté la rendant trop dangereuse,  mais les 8 dés de pierre qui supportaient les piliers en buis de sa structure, sont rachetés par la commune pour la somme de 40 F. Ils se remarquent encore çà et là, notamment vers la bibliothèque.

Aujourd’hui, le centre commerçant de Morestel s’est déplacé vers la ville basse et les nouvelles halles, bâties en 1871, accueillent chaque dimanche, un marché très fréquenté.

La Maison Ravier

Aujourd’hui dédiée à la mémoire du peintre François-Auguste RAVIER (1814-1895), chef de file de l’école Lyonnaise du paysage au XIXe siècle, qui l’habita de 1867 à 1895, cette propriété comprenant maison Bourgeoise, écuries, granges, terrasses et jardins, est achetée en 1730 par Joseph PECOUD à Monsieur de MEYZIEU.

À l’intérieur, la cuisine a gardé son potager à 5 grilles qui servait de cuisinière et qui était toujours placé sous une fenêtre. Le nombre de grille déterminait la taille de la maison et la richesse de ses propriétaires. La maison a également conservé son dallage en pierre et sa grande cheminée.

Son toit mansardé, percé de fenêtres, les 4 rangs de génoises qui soulignent sa base, donnent à cette maison l’élégance des demeures Dauphinoises. Depuis la terrasse, un beau panorama s’offre au regard : monts du Bugey, Chartreuse, Chaîne de Belledonne et Vercors.

Acquise par la commune de Morestel en 1983 et restaurée en 1991, elle est gérée par l’AMRA, Association des Amis de la Maison Ravier, et présente principalement au public des œuvres de Ravier et des expositions temporaires.

Elle a reçu la label « Maison des Illustres » par le ministère de la Culture et de la Communication » en 2012. Ce label est une distinction qui signale au public les lieux qui conservent et transmettent la mémoire des personnalités qui les ont habitées.

Les Toits

Remarquables par leur hauteur (parfois plus importante que celle des murs), les toits dits « Dauphinois » se caractérisent par une charpente à 4 pans et très forte pente et une couverture de tuiles plates écaillées.

La base est légèrement relevée, le coyau, ménage une rupture de pente qui freine la neige et protège les murs du ruissellement des eaux pluviales.

À Morestel, on remarque également quelques toits mansardés, comme celui de la Maison Ravier, qui permettent l’aménagement des combles habitables.

Les toits à redans ou à mantelures (bien connus pour le Vercors), rappellent l’existence de couverture en chaume : le mur pignon débordant évite la prise au vent. Il est lui-même protégé par des dalles de pierre disposées comme des marches, tandis qu’une pierre, le charvet nord, coiffe généralement le sommet.

Une petite histoire dit que lorsqu’il y avait un décès dans la maison, les marches de ce toit particulier permettaient à l’âme du défunt de monter et de s’envoler vers le ciel !

La montée de la Muette

Cette ruelle, pavée de galets, permettait de sortir du Bourg et d’accéder aux points d’eau sans passer par les portes Murine ou St Symphorien.

Son nom vient peut-être du fait que cette ruelle aveugle (sans fenêtre) permettait de sortir discrètement de la ville.

La Porte Murine

Tournée vers la Maurienne, cette porte est la 2e porte marquant l’accès à la vieille ville. L’escalier, situé au niveau de la Porte Murine a été construit par la municipalité en 1839 sur l’ancienne route du Bouchage. La rue Blanche a conservé son nom (qui venait de la couleur des pierres calcaires concassées) et continue après la Porte Murine jusqu’au ruisseau de la Bordel (que l’on traversait à gué). Cette deuxième partie constituait le « Faubourg de Bordel ». Le bâtiment accolé à la Porte abritait une salle de gardes. C’est aujourd’hui une maison d’habitation, avec une grande cheminée et un espace réduit, conservé à ce jour et qui servait certainement de geôle.

La Charpente de Bois

De conception ancienne, cette structure est implantée à une trentaine de mètres de son emplacement d’origine. Remarqué par l’Architecte des Bâtiments de France, ce hangar a été mis en valeur à sa demande. Longtemps désigné à tort comme un séchoir à tabac (cultivé depuis longtemps dans la région) ou à bois, cette armature de bois est aujourd’hui ornementale et illustre le savoir-faire des charpentiers d’autrefois.

L’ancien Hôpital St Jacques

Vers 1440, Gabriel de ROSSILLON ordonne la construction d’un hôpital dédié à St Jacques le Majeur, « par pitié et charité des pauvres de Jésus-Christ qui passent par Morestel ».

Situé hors des remparts, près de la porte Murine, il fut rattaché à l’hôpital de Vienne vers l’an 1600. La Maison GIRAUD a été bâtie au début du XXe siècle, à la place de l’ancien hôpital et de sa chapelle des oraisons.

Le règlement de l’hôpital prévoyait l’accueil des pauvres pour deux ou trois nuits, des femmes enceintes durant un mois, et des enfants trouvés qu’il convenait de garder jusqu’à l’âge de deux ans et demi.

Les Inscriptions Latines

Avant 1830, une inscription Gallo-Romaine fut découverte dans les fondations de l’ancienne église St Symphorien, située hors le bourg.

Il s’agit d’un Autel Votif, c’est-à-dire élevé en remerciement d’un vœu réalisé. La Pierre ainsi dégagée fut encastrée dans le mur du cimetière et surmontée d’une autre inscription en latin, gravée pour l’occasion : le texte exprime la victoire de la Foi chrétienne sur les divinités Païennes.

Inscription du XIXe siècle :

Le signe de Dieu éternel s’élève alors que, comme un fantôme, les fausses divinités s’évanouissent devant la lumière.

OETERNI SURGIT SIGNUM DEITANQUAM QUE PHANTASMA EVANESCUNT ANTE LUCEM NUMINA FICTA

Les Remparts

Le Bourg de Morestel se développe à l’époque Médiévale. Une enceinte fortifiée semi-circulaire, dont une partie reste visible, est construite pour le protéger.

À l’ouest du bourg, c’est l’éperon rocheux, sur lequel subsiste l’ancien donjon du château qui joue le rôle de rempart et assure une protection naturelle au site. Deux portes aménagées dans l’enceinte permettent d’y accéder.

À l’intérieur, plusieurs maisons fortes et le couvent des Augustins s’appuient contre ses murs et forment, avec les commerces et les habitations, une structure urbaine organisée autour du château.

L’Hôtel de Ville

Avant de devenir l’Hôtel de Ville en 1949, ce bâtiment était une maison de maître comportant dix pièces au rez-de-chaussée, et hui au premier étage. Des chambres mansardées formaient le dernier étage.

Sa particularité réside dans le toit à l’impériale ou « souabe », à quatre pans galbés, inventé au XVIe siècle par l’architecte Philibert DELORME.

Un tel toit permet de dégager un volume aménageable important sous les combles. Il est recouvert de tuiles écailles, couverture couramment employée dans la région.

Dans la salle du Conseil Municipal, au dernier étage, la charpente ressemble à une coque de bateau renversée.

Le même type de toiture se retrouve sur le clocher de l’église de Brangues ou coiffant certaines maisons de Vézeronce, de Sermérieu ou des Avenières.